Callisto
Vernissage le mardi 12 avril de 18h a 21h
Et du jeudi 14 avril au mardi 19 avril de 14 h a 19h sauf le dimanche
Voir les dates-infos sur facebook
Prendre RDV : +33 6 63 03 53 21
Catherine Baÿ de 2021 à 2022 invite 6 artistes à interroger à travers nos mythes les socles sur lesquels se sont élevées nos civilisations Sophie Audoubert et Véronique Hubert sont les 2ieme invitées de ce cycle. Elles œuvrent depuis deux ans à une nouvelle interprétation des figures mythologiques greco-latines.
Entre humour et poésie les héros, les héroïnes subissent une lente déconstruction qui donne la voix à des personnages souvent effacé.es par une histoire occidentale qui a fait ses choix de lecture, d’interprétation, de réécritures.
Websites:
http://www.veroniquehubert.com et
https://experiencevirtuelle.com
----
Sans Ovide et ses Métamorphoses, on ne saurait sans doute plus rien, aujourd’hui, de Callisto. Les sources grecques du mythe ont été étrangement escamotées. Le poète latin, lui, s’y attarde longuement, plus que pour d’autres mythes qui ont pourtant plus facilement traversé le mur du temps et nourrissent encore notre imaginaire collectif. Callisto, non. Callisto est oubliée. Elle est oubliée alors que chacun peut, sans le savoir, la contempler à la nuit tombée.
Callisto, c’est la Grande Ourse.
C’est parce que ce mythe étonnamment oublié remue des questions vivement actuelles que nous avons voulu porter sur lui un regard à la fois féminin et moderne.
Avant de devenir constellation, Callisto était une nymphe magnifique (ce que son nom annonce en grec: « la plus belle »), amante discrète de Diane, et pour laquelle Jupiter fut foudroyé de désir dès qu’il l’aperçut. Afin de l’approcher, il conçut un plan sans autre exemple dans la mythologie: le gardien de la puissance virile prit les traits de sa propre fille, Diane, parce qu’il avait deviné les tendres sentiments que la nymphe nourrissait pour elle.
S’ensuit un viol singulier. Callisto se laisse d’abord séduire par celui qu’elle croit être Diane, avant de se débattre violemment quand elle comprend que la déesse est un dieu. En vain: personne ne ressort victorieux d’un tel combat contre Jupiter.
Callisto, enceinte des œuvres du dieu, est chassée, quelques mois plus tard, de la troupe de Diane, pour avoir enfreint la règle d’or de la déesse: elle n’est, de toute évidence, plus vierge. Elle accouche peu de temps après d’un fils, Arcas. C’est le moment que choisit Junon, la sœur épouse de Jupiter, pour assouvir sa vengeance: elle métamorphose Callisto en ourse.
Quinze ans plus tard, Arcas, devenu jeune chasseur, tombe sur sa mère. Lui ne voit qu’un fauve effrayant, mais l’ourse semble le reconnaître et veut s’approcher. Il prend peur et s’apprête à la tuer. Jupiter, pour éviter au monde la souillure d’un matricide (dont il serait, de plus, la cause originelle), les métamorphose tous les deux en constellations.
Ovide, dans son récit, est particulièrement sensible au sort de Callisto. Son écriture fait résonner, presque physiquement, la violence de ce que subit la nymphe. On éprouve avec elle la double aliénation, du viol puis de la métamorphose.
Nous avons donc souhaité explorer, en intriquant l’image et l’écriture, dans un geste hybride qui rend hommage aux « métamorphoses », la radicalité de cette plongée dans un corps étranger. En réécrivant le mythe, la question pour nous devenait: comment Callisto, comment la femme peut-elle reprendre possession de son corps et redevenir maîtresse de son destin?